Que souhaitiez-vous transmettre à travers l’exposition «Elles» et plus largement, à travers votre art ?
Liberaj Cicoj : Je pars d’un constat sociétal navrant et très clair : les femmes sont souvent jugées sur leurs apparences, deviennent des objets commerciaux, leur corps et leurs seins sont ultra sexualisés. J’essaie donc de remettre ces corps à leur place, où le sein devient beau, brillant, éclatant, majestueux… Avec Aurélia, on se retrouve dans cet art féministe et activiste, notamment via le collectif All Inclusive.
Aurélia Gritte : Comme Liberaj, mes œuvres sont féministes mais de mon côté, j’évoque aussi la lutte pour tous les droits humains, contre toute forme de discrimination. Demandons-nous si nous aimerions être à la place de toutes les personnes dont les droits sont bafoués ? Finalement, mes toiles montrent qu’on a tous un besoin de sécurité.
L’éducation artistique et culturelle, la médiation : à quel point la transmission de votre art est importante pour vous ?
Aurélia Gritte : Toutes les villes devraient faire de l’éducation artistique et culturelle ! De mon côté, je ne prétends pas détenir la vérité et ne suis pas là pour imposer des idées : l’art est là pour questionner. Devant les enfants, j’utilise le biais de l’éducation civique : « Tous les hommes naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Je leur demande ensuite s’ils avaient un superpouvoir pour combattre les injustices, lequel serait-il ? Le mien, c’est l’art.
Liberaj Cicoj : Pour ma part je n’ai fait de la médiation qu’auprès des adultes. J’aime aussi les inviter à se questionner. C’est pourquoi je ne parle pas tout de suite de ma technique pour éviter qu’on soit offusqué ou surpris, ce qui permet ensuite de croiser nos regards et de discuter. Contrairement à l’art figuratif d’Aurélia, mes œuvres abstraites appellent davantage à l’imaginaire et la libre interprétation.
Qu’est-ce qui fait, à l’une et l’autre, la singularité de votre démarche artistique ?
Liberaj Cicoj : Mon cerveau a travaillé tout seul : un jour, j’ai eu cette image de moi en train de coller mes seins partout ! C’était ma réponse à ce monde qui se plait à les cacher… Mes seins sont donc devenus un support. Cependant, exposer mes œuvres est très récent, j’ai fait mon « coming out artistique » en septembre 2022 ! En franchissant ce pas, j’ai accepté de me dévoiler.
Aurélia Gritte : Mon art est un mélange de supports, de techniques et de courants artistiques : j’ai toujours testé des choses de manière naturelle, que ce soit avec la peinture, la linogravure, le dessin. J’aime me réinventer pour créer.